jeudi 23 janvier 2014

Le rendez-vous manqué

Il faudra que je fouille un peu plus mes souvenirs : je ne me souviens pas bien de Franz avant le cours moyen. Et pourtant, il habitait dans la même rue que moi depuis la maternelle.
Je me souviens de leur appartement en rez-de-chaussée d'une grande maison. Dans le salon, il y avait toute la collection des Contes et légendes. J'étais impressionné.
J'avais du aller jouer chez lui à plusieurs reprises. Je me souviens aussi du terrain en friche juste à côté et d'un après-midi dans une cabane avec les garçons du quartier. Un des rares moments où j'ai fait ce genre de choses. J'étais un enfant solitaire. Beaucoup plus jeune que mes frères, j'avais appris à jouer seul. Je sortais rarement dans la rue, si ce n'est pour la traverser et passer un moment chez mon voisin d'en face...
Donc Franz. Je ne m'en souviens pas non plus en classe alors que j'ai tant de souvenirs d’Émile ! Peut-être était-il dans une autre classe ? C'est curieux.
J'étais un enfant très doux, trop sans doute. Pour les plus durs, je ne savais pas me battre et je passais pour une fillette. Tu imagines comment on aurait pu me traiter à une époque plus proche... Je me battais parfois avec mon frère, il avait bien sûr toujours le dessus avec ses 10 ans de plus. La violence me faisait horreur et je préférais me tirer des situations difficiles autrement.
Que s'est-il passé ce soir là à l'étude ? Dans la cour de récré, Franz et moi, nous nous sommes battus. Farouchement. Où étaient passés les instituteurs ? Les autres enfants, étonnés, nous entouraient. Je me souviens d'un côté animal, à quatre pattes même. Redoutable face à face. A un moment, Franz m'a craché au visage. Il avait bien préparé son coup. Je fus inondé. Le goût de sa salive m'a surpris mais ne m'écœura pas. Puis le combat cessa et nous nous sommes serrés la main. Ensemble, nous sommes allés nous laver les mains, moi le visage. Puis nous sommes rentrés dans notre rue. Toujours ensemble et discutant, comme deux copains de toujours.
Nous sommes vus souvent à cette époque. Pour mon anniversaire, Frédéric m'a offert deux Contes et légendes de la collection familiale. J'étais touché et j'ai toujours gardé ces deux livres,  souvent relus.
Une belle amitié était née.
Pendant l'été, Franz et sa famille ont déménagé de l'autre côté de la ville. Ils avaient fait construire une maison. Je crois qu'on s'est écrit, pas très longtemps. A cet âge là, si la présence n'est pas là pour entretenir la flamme...
Nous ne sommes jamais revus.
Quinze ans plus tard, j'ai reconnu sa mère en ville. Elle m'a donné des nouvelles de Franz. Je les ai oubliées.
Franz est resté pour moi un conte et légende de mon enfance.

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